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🐔 St-Hubert : De la rue St-Hubert à une vente de 537 M$ — Comment vendre une entreprise culte sans perdre son ñme

🐔 St-Hubert : De la rue St-Hubert à une vente de 537 M$ — Comment vendre une entreprise culte sans perdre son ñme

Entreprisesavendre.quebec
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Leçons d’une transmission emblĂ©matique pour les entrepreneurs quĂ©bĂ©cois

Introduction : Quand une rĂŽtisserie devient un mythe

On dit souvent que certaines marques font partie de notre ADN collectif. Au QuĂ©bec, St-Hubert, ce n’est pas seulement du poulet rĂŽti. C’est une icĂŽne. Une tradition. Un bout de notre mĂ©moire gustative. C’est la nappe jaune et rouge, le petit coq joyeux sur le toit, et la fameuse sauce brune que mĂȘme les sceptiques gardent dans leur garde-manger « au cas oĂč ».

Mais comment passe-t-on d’un petit restaurant de quartier Ă  une institution nationale ? Et surtout, comment vend-on une entreprise si profondĂ©ment enracinĂ©e dans la culture quĂ©bĂ©coise sans trahir sa mission, ses fondateurs, ses employĂ©s ni ses clients ?

Dans cet article, on retrace l’histoire fascinante de St-Hubert — de sa fondation Ă  sa vente, de ses enjeux familiaux Ă  sa transmission stratĂ©gique — pour en tirer des leçons concrĂštes pour toute PME quĂ©bĂ©coise confrontĂ©e au passage de flambeau.



đŸ„„ 1. La naissance d’un empire : Rue St-Hubert, 1951

Les fondateurs : René et HélÚne Léger, des précurseurs

C’est sur la rue St-Hubert, Ă  MontrĂ©al, en 1951, que RenĂ© LĂ©ger et sa femme HĂ©lĂšne ouvrent une petite rĂŽtisserie. InspirĂ©s par le succĂšs du poulet rĂŽti Ă  la broche populaire en Europe, ils veulent offrir un repas rapide, abordable et constant, dans une ambiance chaleureuse.

Leur recette ? Une combinaison unique de :

  1. Sauce maison légendaire

  2. Cuisson rotative visible par les clients

  3. Service rapide

  4. Accueil familial

TrĂšs vite, les MontrĂ©alais affluent. Le bouche-Ă -oreille fait le reste. Et dĂšs les annĂ©es 1960, le couple commence Ă  ouvrir d’autres succursales.

1965 : Pionniers de la franchise au Québec

St-Hubert devient la premiĂšre chaĂźne quĂ©bĂ©coise Ă  utiliser le modĂšle de la franchise. Ce modĂšle leur permet de croĂźtre sans diluer l’identitĂ© de la marque : chaque franchisĂ© est formĂ© aux standards de qualitĂ©, et la production (sauces, Ă©pices, ingrĂ©dients) est centralisĂ©e.

C’est aussi Ă  cette Ă©poque que l’entreprise dĂ©veloppe son usine alimentaire Ă  Boisbriand, qui deviendra l’un des joyaux de son efficacitĂ© logistique.



🔬 2. L’ADN St-Hubert : Une culture plus forte qu’une recette

Le secret : Standardisation + authenticité

Ce qui a propulsĂ© St-Hubert, c’est sa capacitĂ© Ă  offrir la mĂȘme expĂ©rience partout. Le goĂ»t, la prĂ©sentation, l’accueil – tout est codifiĂ©. Mais, paradoxalement, cette rigueur s’allie Ă  une authenticitĂ© Ă©motionnelle : le client a l’impression de venir chez lui, mĂȘme Ă  300 km de la maison.

Une marque plus grande que ses produits

Dans les annĂ©es 1970 et 1980, l’entreprise commence Ă  distribuer ses produits en Ă©picerie. La fameuse sauce St-Hubert entre dans les foyers. Puis ce sera le pĂątĂ© au poulet, les salades, les desserts. On ne mange plus seulement « au St-Hub », on mange du St-Hubert, partout.

Cette diversification crée un double actif :

  1. Une notoriété inégalée au Québec

  2. Un levier de croissance en dehors des salles Ă  manger



🧭 3. Une gouvernance familiale exemplaire

Jean-Pierre LĂ©ger : Le fils qui a fait croĂźtre l’hĂ©ritage

À la mort de RenĂ© LĂ©ger, c’est son fils, Jean-Pierre LĂ©ger, qui reprend le flambeau. ÉduquĂ©, discret, mais stratĂšge, il refuse les offres de fonds d’investissement qui voulaient « l’ouvrir Ă  l’international ». Il prĂ©fĂšre solidifier le QuĂ©bec, innover en logistique, et respecter la culture d’entreprise.

Il lance :

  1. Des points de vente express

  2. La livraison centralisée (bien avant Uber Eats)

  3. Des applications mobiles pour la commande

  4. Un systĂšme de contrĂŽle qualitĂ© digne de l’industrie pharmaceutique

Pas d’hĂ©ritier : le dĂ©but de la rĂ©flexion sur la vente

Jean-Pierre LĂ©ger n’a pas d’enfants. Le dĂ©fi de la relĂšve devient central. Il tente de structurer une relĂšve interne, mais se rend vite compte que la culture familiale ne peut se reproduire indĂ©finiment sans une vision claire.

Il faut trouver un acheteur qui perpĂ©tuera l’ADN, pas seulement le modĂšle d’affaires.



💾 4. 2016 : Une vente à 537 M$ qui fait jaser

L’acheteur : Cara Operations (Recipe Unlimited)

En 2016, l’annonce tombe : St-Hubert est vendu Ă  Cara Operations, un gĂ©ant ontarien de la restauration (Swiss Chalet, Milestones, Kelsey's, etc.). Le montant de la transaction : 537 millions de dollars.

Pour plusieurs, c’est une trahison. Vendre St-Hubert à une entreprise ontarienne ? À un concurrent (Swiss Chalet) ?

Mais pour Jean-Pierre LĂ©ger, c’est un acte de continuitĂ©. Les conditions sont strictes :

  1. Le siĂšge social reste Ă  Boisbriand

  2. Les usines restent en territoire québécois

  3. L’autonomie de la marque est prĂ©servĂ©e

Et surtout : les emplois sont maintenus, l’innovation se poursuit, et la marque continue de croütre.



🧠 5. Leçons stratĂ©giques pour les entrepreneurs quĂ©bĂ©cois

Pourquoi vendre ne veut pas dire trahir

Beaucoup d’entrepreneurs craignent que vendre leur entreprise signifie abandonner leur mission. Mais le cas de St-Hubert prouve le contraire : vendre, c’est parfois prĂ©server.

Voici les conditions gagnantes d’un transfert rĂ©ussi :

A. PrĂ©parer la vente des annĂ©es Ă  l’avance

Jean-Pierre LĂ©ger a rĂ©flĂ©chi 10 ans avant de vendre. Il a analysĂ©, sondĂ©, rencontrĂ©. Il ne s’est pas prĂ©cipitĂ©.

B. Choisir un acheteur aligné avec les valeurs

Cara a dĂ©montrĂ© son respect des marques. Elle n’a pas fusionnĂ© St-Hubert avec Swiss Chalet. Elle a gardĂ© les deux identitĂ©s, deux cultures, deux clientĂšles.

C. Protéger les équipes, les fournisseurs et les clients

St-Hubert n’a pas licenciĂ©, n’a pas externalisĂ©. La chaĂźne logistique quĂ©bĂ©coise est restĂ©e intacte.



📈 6. Impact Ă©conomique : St-Hubert en chiffres

IndicateurValeur (au moment de la vente en 2016)
Nombre de restaurants117
Employés10 000+
SiĂšge socialBoisbriand, QC
Chiffre d’affairesEnviron 600 M$
Plats servis par année25 millions
Produits distribués en épicerie3000+ points de vente



🔍 7. Cas St-Hubert et autres grandes ventes quĂ©bĂ©coises

St-Hubert n’est pas seule. Le QuĂ©bec a connu plusieurs ventes majeures de marques iconiques :

  1. LĂ©on Courville Vigneron repris par un fonds d’investissement rĂ©gional

  2. BonLook vendu Ă  FYidoctors (Alberta)

  3. Rachelle-Béry vendue à Metro

Chacun de ces cas présente des enjeux de relÚve, de maintien de culture, et de transfert de valeurs.



đŸ’Œ 8. Comment structurer la vente de votre entreprise

A. L’évaluation

  1. Refaire les états financiers

  2. Déterminer la valeur des actifs tangibles et intangibles

  3. Évaluer la valeur de la marque (St-Hubert = marque de 200 M$+)

B. Le profil du repreneur idéal

  1. Repreneur familial

  2. EmployĂ© de l’entreprise

  3. Compagnie concurrente

  4. Fonds d’investissement

  5. Coopérative ou collectif (rare, mais croissant)

C. Accompagnement par des experts

  1. Fiscalistes

  2. Courtiers en entreprise

  3. Notaires spécialisés

  4. Coach en relĂšve entrepreneuriale



🔄 9. Les risques d’un mauvais transfert

Ce que Jean-Pierre Léger a évité :

  1. L’érosion de la culture

  2. Le remplacement du personnel

  3. La perte de contrÎle du Québec sur une marque culte

  4. L’intĂ©gration brutale dans une structure Ă©trangĂšre

Un transfert bĂąclĂ©, c’est souvent une faillite dĂ©guisĂ©e Ă  long terme.



🛠 10. Outils concrets pour les entrepreneurs

OutilFonction
Check-list de préparation à la venteIdentifier les faiblesses à corriger
Plan de relĂšve familialIdentifier les membres aptes Ă  prendre le flambeau
Audit de marqueÉvaluer l’actif immatĂ©riel
Plan d’intĂ©gration du repreneurMinimiser les perturbations culturelles
Plan de communication interne/externeÉviter les chocs mĂ©diatiques ou organisationnels



🧹 11. Et si St-Hubert avait Ă©chouĂ© son transfert ?

Imaginez :

  1. Le siÚge social déplacé en Ontario

  2. Les produits remplacés par Swiss Chalet

  3. Le personnel licencié

  4. La sauce modifiée

  5. L’ñme perdue

Mais cela ne s’est pas produit. Pourquoi ? Parce que la vente a Ă©tĂ© rĂ©flĂ©chie comme une mission.



🎯 Conclusion : Le poulet, la sauce et la vision

St-Hubert a prouvĂ© qu’il est possible de vendre sans se vendre.

Pour les entrepreneurs quĂ©bĂ©cois, le message est clair : votre entreprise est plus qu’un actif. C’est une vision. Un legs. Une histoire.

Et cette histoire peut continuer mĂȘme entre d’autres mains, si la transition est bien planifiĂ©e.



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